Film étonnant à plus d’un titre.
L’écriture.
Le film commence mollement comme un western de série B, gentillet et bourré de clichés (le vieux muletier), pour mieux nous surprendre dès la première confrontation avec les bandits, dans la station relais où arrive la diligence.
On passe alors à une écriture sèche, efficace, racée (d’après un roman d’Elmore Leonard) avec des personnages à la fois complexes et marquants, une violence crue pour l’époque (le massacre de la famille Parker), et des situations qui se développent de manière inattendue. Tout se passe ensuite dans un seul lieu et sur quelques jours.
Le décor
Les déserts rocheux de l’Arizona, jonchés d’éboulis, comme si la terre avait été retournée.
Le héros
Dans les premières scènes on découvre Patrick Brennan (Randolph Scott, ci-contre) : ex-cow-boy, devenu éleveur solitaire, ce n’est pas le traditionnel ex-tueur à gage, ni as de la gâchette devenu shérif. Il va se faire embarquer dans cette histoire de prise d’otages. Il est décontracté, sympathique, sûr de lui mais sans avoir la grosse tête. Il n’a rien du héros inexpugnable, sombre et menaçant : c’est un homme simple, humble, souriant. Il est grand mais plutôt gauche, avec un côté Gary Cooper, mais plus convaincant en cul-terreux. Et même de dos, Randolph Scott est expressif : comme tous les vrais comédiens, il « dégage ».
Ils ont de l’allure et ne font pas « fake ». Il y a Billy Black, le jeune un peu demeuré, et Chink (Henry Silva, ci-contre), avec sa chemise rose et son rictus inquiétant : « Nothing but animals », dit le chef moustachu Frank Usher (Richard Boone), en parlant de ses acolytes.
Ce personnage complexe et attachant est attiré par son prisonnier Pat, dont il va se révéler être une sorte de double négatif. Il lui confie ses rêves : « I'm gonna have me a place someday. I thought about it, I thought about it a lot. A man should have somethin' of his own, somethin' to belong to, to be proud of. »
- And you think you'll get it this way ?
- Sometimes you don't have a choice.
- Don't you?
Humain, Frank est même sympathique. Son éclat de rire quand Pat sort de la cabane en se cognant la tête est communicatif.
La femme
Autre rapports étonnants : ceux entre Pat et Doretta Mims (Maureen O’Sullivan, la mère de Mia Farrow, et la compagne de Tarzan). Ils ne se connaissent pas et se retrouvent prisonniers dans une cabane. Elle a été présentée comme un objet sexuel périmé, sans intérêt (si ce n’est d’être l’héritière du plus riche propriétaire de la région) ; lui, c’est l’homme mûr, grisonnant. Entre eux, rien de l’ordre du désir. Du reste, Doretta est en voyage de noces, même si son couard de mari a pris la poudre d’escampette et l’a laissée en otage. Ça donne donc lieu à une jolie scène, tendre et respectueuse.
D’où la surprise quand un peu plus tard, dans le même lieu de réclusion, alors que le danger n’est que plus imminent, Pat lui ouvre les yeux sur la mascarade qu’a été son mariage (elle ne voulait pas finir vieille fille), la fait basculer et l’embrasse avec virilité.
Finalement, c’est la victoire de la ruse, de l’ingéniosité et de la solidarité entre Pat et Doretta. « Come on now, it’s gonna be a nice day », lui dit-il à la fin, et il s’en vont, boitant mais enlacés, vers de vastes horizons.
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